Avant-hier, dans son journal de 20 heures, France 2 a eu la bonne idée de diffuser un reportage sur les chimpanzés. Plus exactement sur une paléoanthropologue occupée à observer une colonie de chimpanzés en Ouganda. Je suis très friand de ce genre de reportages, car ils peuvent nous en apprendre beaucoup sur nous-mêmes, les êtres humains. Je suppose que vous savez que nous avons 99% de gènes en commun avec
le chimpanzé et avec le bonobo. Mais savez-vous que, contrairement à l’idée reçue, l’Homme ne descend pas du singe ? En réalité, l’Homo Sapiens et le singe descendent d’un ancêtre commun, le fameux chaînon manquant. Ça fait une grosse différence, car ça signifie que nous
sommes situés sur une même branche de l’évolution. Nous sommes cousins avec certains primates, dans la même famille des hominidés, c’est-à-dire celle des grands singes évolués. Il est donc particulièrement intéressant de voir comment des animaux tellement apparentés à nous se débrouillent dans leur environnement naturel.
Dans sa première partie, le reportage de France 2 confirmait ce que les scientifiques ont récemment découvert : les singes pratiquent la phytothérapie en automédication ! Lorsqu’ils sont malades, les chimpanzés consomment en effet certaines plantes qui ne font pas partie de leur régime alimentaire habituel. Ils absorbent par exemple, sans les mâcher, les feuilles entières et rugueusesd’Aspilia, ce qui a pour effet d’évacuer les parasites de leur tube digestif. Dans le reportage, l’anthropologue française explique aussi que seuls les singes qui toussent jettent leur dévolu sur les feuilles d’eucalyptus : ce n’est certes pas un hasard ! Et pourquoi certains d’entre eux sucent-ils la tige amère de Vernonia amygdalina ? La réponse réside probablement dans le fait, dernièrement mis à jour, que ce végétal contient de puissants composants antioxydants et antitumoraux. Si ça se trouve, le singe possède déjà un remède souverain contre le cancer, que son cousin humain cherche en vain depuis des siècles ! D’autres molécules repérées dans le biotope des chimpanzés les aideraient à se protéger de diverses maladies infectieuses, notamment le paludisme. Au lieu de vaccins et de produits pharmaco-chimiques, ce sont donc de bonnes vieilles plantes médicinales qui représentent le meilleur espoir actuel de faire refluer ces fléaux. Avec de simples jumelles braquées sur la canopée tropicale, la connaissance avance plus sûrement que dans les rutilants labos de la science occidentale !
Et ce n’est qu’un début. Dans la deuxième partie du reportage, le journal de France 2 relatait une réalité à la fois atroce et fascinante : parmi la centaine de chimpanzés observés, un tiers a une patte mutilée ! À proximité de la forêt, se trouvent en effet des plantations de thé dont les travailleurs exploités n’ont d’autre choix, pour améliorer l’ordinaire, que de se livrer au braconnage. Leurs cruels collets en fil de fer obligent souvent les animaux piégés à sacrifier une main ou un pied pour pouvoir s’échapper. Ce qui est hallucinant, c’est que la plupart, sinon la totalité, des victimes survivent à la mutilation.
Mais comment font-elles ?
Comment est-il possible de surmonter un tel trauma sans chirurgie, ni anesthésie, ni sulfamides, ni transfusion sanguine, ni fil à recoudre ? Comment se fait-il que la plaie se referme spontanément, que le moignon se suture sans infection fatale et que les singes si sévèrement blessés finissent majoritairement par guérir ?
Malheureusement, la séquence télévisée était muette sur ce point. Le journaliste a expliqué que les chimpanzés rescapés étaient pris en charge par leur communauté, laquelle les aidait à vivre avec leur handicap. Non contents d’avoir inventé la médecine, les singes ont donc, bien avant nous, inventé la sécurité sociale. Mais le téléspectateur restait sur sa faim puisqu’on ne lui a donné aucune explication sur le prodige d’autoguérison. On ne sait pas s’ils utilisent également des plantes cicatrisantes ou si leurs habitudes géophagiques (eh oui, les chimpanzés aussi mangent de la terre…) les situent en pointe de l’argilothérapie. On ne les voit pas lécher leurs chairs à vif, ce qui renseignerait sur un pouvoir supplémentaire de la salive. On n’apprend pas non plus si la pratique du jeûne ou si des changements alimentaires interviennent pendant la convalescence. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a de nombreux survivants « miraculés » alors que les singes n’ont, sauf erreur de ma part, pas encore inventé le bloc opératoire et le scalpel électronique. Ce qui est donc absolument certain, c’est que nos proches cousins se guérissent naturellement et sans séquelle de traumatismes aussi effroyables que l’(auto)-arrachement d’un membre.
En soulignant ce phénomène sous le titre « Singeons les singes », mon intention n’est évidemment pas de détourner qui que ce soit de la chirurgie. Au contraire, cette branche de la médecine moderne représente à mes yeux un vrai et fabuleux progrès thérapeutique. Si d’aventure je me coupais une main en taillant ma haie, il est clair que je monterais dans l’ambulance ! Ce que je voulais partager, c’est ma profonde conviction que la nature est puissamment guérisseuse si on lui laisse le loisir d’exercer ses bienfaits curatifs. Au lieu de vouloir absolument tout soigner et au lieu de se médicaliser l’existence jusqu’à l’absurde, l’être humain pourrait (re)découvrir les vertus de la patience et de la confiance. Laisser du temps au temps et laisser le corps se réparer par ses propres forces, ce sont les axes majeurs de la naturopathie traditionnelle, telle que l’enseignait André Passebecq. Ce sont aussi deux précieux outils de santé que nos cousins les singes emploient avec énormément de succès. Imitons-les, singeons-les ! Soyons au moins des bonobos pour affronter tous les bobos bénins de la vie quotidienne….
Yves Rasir (Néosanté)